Dans les articles précédents, nous avons évoqué l’importance d’un sol vivant pour une ferme agroécologique. Aujourd’hui, nous vous expliquons ce qu’est un sol vivant, de quoi il est composé, et ce qu’il permet. C’est parti pour un topo sol !
Qu’est-ce qu’on entend par « sol vivant » ?
Pendant de nombreuses années, le sol était perçu par le monde agricole comme un simple support pour les cultures, ou encore comme un substrat inerte. Avec l’émergence de l’agroécologie et des pratiques de maraîchage sur sol vivant[1] (MSV), le sol a été complètement remis en perspective. Il est désormais considéré comme un écosystème à part entière, avec sa propre faune, et ses caractéristiques physico-chimiques qui évoluent. Il est donc très important de prendre en compte ces aspects, car un sol vivant est un sol fertile.
Qui vit dans un sol vivant ?
Le sol est composé de nombreux êtres vivants, que l’on peut classer en 3 groupes :
- Les micro-organismes: Les micro-organismes sont les plus petits organismes que l’on peut trouver dans le sol. Ces organismes mesurent moins de 100 micromètres. On trouve parmi eux les bactéries, champignons, algues, protozoaires et nématodes. Ces organismes ont divers rôles, comme la décomposition chimique de la matière, la régulation des cycles de recyclage des matières, la dégradation des polluants, ou encore la structuration du sol.
- Les méso-organismes : La mésofaune est composée d’espèces comprises entre 100 micromètres et 2 mm. On trouve par exemple des acariens, des collemboles, des enchytréides, des diptères, des diploures ou encore des formicidés (fourmis). Ces organismes sont des fragmenteurs, ils augmentent donc la surface de contact entre la matière et les micro-organismes, afin de faciliter leur décomposition.
- Les macro-organismes: ce sont les espèces mesurant plus de 2 mm. On y trouve les myriapodes (mille-pattes), isopodes (cloportes), arachnides (araignées), coléoptères, mollusques (limaces, escargots) et oligochètes (vers). Ces espèces “ingénieures” enfouissent les résidus de matière organique dans le sol, permettant ainsi de les mettre au contact des méso-organismes et micro-organismes qui vont les dégrader. Dégrader la matière permet de rendre à nouveau disponibles des éléments nutritifs pour les plantes. Ces espèces créent aussi des galeries dans le sol, modifiant ainsi les caractéristiques physiques, chimiques et biologiques du sol. Ils jouent également un rôle dans la fragmentation de la litière.
Ces organismes sont donc très utiles aux cultures. Contrairement à ce que l’on aurait tendance à penser, seulement 2% des insectes présents sur la planète sont nuisibles pour les cultures (Villenave et al, 2010).
Ce que permet un sol vivant
La vie du sol permet de rendre divers services écosystémiques[2]. Elle permet par exemple d’obtenir une structure biologique très stable, un drainage naturel, d’éviter l’érosion du sol, d’améliorer la réserve utile en eau, de décomposer la matière, d’éliminer les résidus de produits chimiques… Tout cela permet la bonne disponibilité des minéraux pour les cultures, des cultures en bonne santé, un environnement amélioré, et donc de meilleurs rendements et résultats économiques. En bref, un sol vivant permet une agriculture plus durable !
Comment obtenir un sol vivant ?
Diverses techniques agroécologiques existent pour favoriser un sol vivant. Les principales sont listées dans notre article sur l’agroécologie en pratique. On peut par exemple citer le travail réduit du sol (sans retournement), les couverts végétaux, ou encore l’apport d’amendements organiques comme les fumiers, composts ou lisiers (Delaunois et al., 2014). Le but est de nourrir la vie du sol, afin qu’elle puisse fonctionner de manière optimale, et que les cultures puissent s’alimenter avec les éléments rendus disponibles dans le sol. Il faut également lui assurer un habitat adapté, grâce aux couverts végétaux par exemple, qui réduisent les températures extrêmes, facilitent l’infiltration des précipitations, limitent l’évaporation et l’érosion (Bailey, 2014). L’oxygène est aussi un élément essentiel au bon fonctionnement du sol, ainsi que l’apport d’eau.
En conclusion, un sol correctement soigné est un sol vivant et partiellement ou complètement autosuffisant pour l’alimentation des cultures !
Références
- Bailey S., 2014. Article Un sol vivant. Agriculture de conservation.com.
- Delaunois A. et al., 2014. Présentation Intérêts d’un sol vivant. Chambre d’agriculture du Tarn.
- Sirami C. et al, 2016. Services écosystémiques dans les agroécosystèmes. Dictionnaire d’agroécologie.
- Villenave-Chasset J. et al., 2010. Les insectes auxiliaires des cultures et d’élevage. Dans Alter Agri n°103, p.13-15.
Pour aller plus loin
- Bertrand B., Renaud V., 2009. Le génie du sol vivant – ferments d’une révolution agronomique. Terran.
- Bourguignon C., Bourguignon L., 2015. Le sol, la terre et les champs – Pour retrouver une agriculture saine. Broché.
- Hervé-Gruyer P., Hervé-Gruyer C., 2019. Vivre avec la Terre, Actes Sud : Ferme du Bec Hellouin.
- La Ferme de Cagnolle, 2021. Une ferme sur sol vivant – le film
- Levavasseur V., 2021. Vidéo Ver de Terre Production Mon potager en sol vivant !
- Mulet F., 2020. Vidéo Ver de Terre Production Les fondamentaux du maraîchage sol vivant
- Mulet F., 2020. Vidéo Ver de Terre Production Le vivant et le sol vivant, intervention lors de la journée Sol Vivant au Havre
[1] Le maraîchage sur sol vivant est un mouvement agricole pour lequel le but est de reconstituer dans les parcelles agricoles le cycle naturel de la fertilité des sols par des itinéraires techniques spécifiques, qui s’appuient notamment sur l’arrêt du travail du sol et l’apport de matière organique au sol.
[2] Les services écosystémiques sont définis comme étant les biens et services que les hommes peuvent tirer des écosystèmes, directement ou indirectement, pour assurer leur bien-être (nourriture, qualité de l’eau, paysages,…) (Sirami et al., 2016).